L’éducation positive ou la naissance de l’enfant roi ?

Je donne des ateliers de communication bienveillante destinés aux parents depuis trois ans. L’éducation dite « positive » s’impose peu à peu comme un slogan. Comme si derrière ces simples mots se trouvait un miracle : la fin des conflits, une famille épanouie dans laquelle les enfants seraient devenus des adultes responsables, rationnels. Il suffirait de les écouter, d’être gentil, compréhensif, calme, zen… Cela ramène le parent éducateur à une espèce de robot « désaffectivé » qui ne serait jamais atteint par la non-collaboration de ses enfants et saurait rechercher dans son logiciel interne la réponse qui apaise l’atmosphère. Or, puisque les adultes sont aussi des êtres remplis d’affects, pas toujours rationnels non plus, la culpabilité d’avoir mal réagi à la crise de son enfant nous revient en pleine face et nous place, parents, devant un constat d’échec : je ne suis pas capable de pratiquer l’éducation « positive ». La probabilité d’envoyer paître cette éducation vécue comme une quasi-injonction sociétale est grande…

La communication bienveillante ce n’est pas être gentil, ce n’est pas une éducation démocratique dans laquelle l’enfant et l’adulte doivent vivre une relation symétrique. Si l’enfant et l’adulte sont égaux en dignité, ils ne le sont pas en expérience. De même qu’un mammifère apprend à ses petits à survivre dans son milieu, nous avons, parents, le devoir de transmettre nos expériences à nos enfants sans les empêcher de faire les leurs. À chacun de définir ses valeurs et ses propres limites, à chacun de définir si une expérience peut être bénéfique ou si elle est dangereuse pour nos chérubins et de les en protéger dans un tel cas.

La communication bienveillante ce n’est pas éviter les conflits et bannir la colère, la tristesse ou la peur de son foyer. C’est apprendre aux enfants à gérer leurs conflits, c’est les éduquer à identifier leurs émotions et à les exprimer pour ne plus les subir, mais les apprivoiser.

La communication bienveillante, c’est d’apprendre que dans tout échange avec autrui se joue une part d’affectivité et en tenir compte, c’est percevoir l’impact de nos actes et de nos paroles chez autrui et sur soi pour construire l’empathie.

Pour terminer, quand mes enfants ne rangent pas leurs chaussures, veulent partir en T-shirt à l’école alors qu’il fait 0 °C, insistent pour acheter le dernier jouet hors de prix à la mode, refusent de se préparer alors que nous sommes déjà en retard… je ne suis pas gentil, je ne laisse pas tomber, j’écoute mes émotions, je mets des mots sur les leurs et sur les miennes. Souvent, je trouve un moyen constructif de les aider à grandir et à mieux vivre ensemble. Parfois, je m’emporte, je ne suis pas à propos, je me laisse déborder par mes émotions, c’est ce qui fait de moi un être humain. Ce qu’il y a de bien avec les enfants, c’est qu’à chaque fois que je réagis de façon inappropriée, je sais qu’une occasion de mieux réagir se présentera très vite. L’éducation positive, c’est aussi s’observer en train d’éduquer et oser porter un regard critique sur ses actes.

J’ai parfois peur que le slogan « éducation positive » ne pousse de plus en plus de parents à oublier que si un enfant a besoin de liens empathiques, il a aussi besoin de grandir dans un cadre structurant constitué de limites, au risque de devenir un enfant roi ne sachant pas vivre en société…

Christophe

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